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Le rôle des communautés compatissantes dans le chagrin et le deuil

Bien que l’approche de communauté compatissante soit mondiale, le Canada et particulièrement la province de la Colombie-Britannique en ont été des adeptes précoces et inspirés. Dirigée par le Dr Eman Hassan et par Pablita Thomas avec un groupe de conférenciers canadiens et internationaux, la séance intitulée « » se penchera sur les façons dont les praticiens, les bénévoles communautaires et les décideurs du système de santé envisagent relier aux ressources essentielles et de sensibiliser davantage au chagrin et au deuil comme faisant partie du continuum de soutien aux soins palliatifs et de fin de vie.

Dre Eman Hassan
est un médecin de santé publique avec plus de 25 ans d'expérience dans la direction d'initiatives de santé publique et communautaire en Colombie-Britannique et à l'étranger. Eman est directrice générale du BC Centre for Palliative Care (BCCPC) et professeure adjointe à la division de médecine palliative de l'UBC. Sous la direction d’Eman, l’initiative Compassionate Communities du BCCPC et celles des Interventions de planification préalable des soins ont été reconnues comme pratiques exemplaires au niveau national. Eman est l'autrice du livre blanc du BCCPC intitulé « L'approche de santé publique des soins palliatifs » qui décrit les différents concepts d'application de cette approche, y compris le concept des communautés compatissantes. Tout au long de sa carrière, Eman a reçu des prix prestigieux pour sa contribution à la santé des populations et des communautés.

est un cadre supérieur du secteur de la santé publique. Elle a travaillé dans les secteurs de la santé publique (niveaux ministériels et bureaucratiques) et dans des secteurs sans but lucratif depuis plus de 15 ans. Elle est actuellement directrice générale de la BC Hospice Palliative Care Association. Pablita siège au BC Rural Health Linked Sectors en tant que collaboratrice sectorielle et au conseil d'administration de CARIPALCA – The Caribbean Palliative Care Association.

La Dre Hassan et Mme Thomas ont Ă©tĂ© interviewĂ©s par Devon Phillips, gestionnaire du programme de soins palliatifs de ş«ąúÂăÎč.

Devon Phillips (DP) : Dans le contexte d'une maladie grave, qu'est-ce qu'une communauté compatissante ?

Eman Hassan (EH) : L'approche Compassionate Community est un mouvement mondial lancé en 2011 en Australie par le professeur . Suite à sa visite dans la province du Kerala en Inde, il a été impressionné par la manière dont les partenaires communautaires à but non lucratif aidaient les personnes souffrant d'une maladie limitant l'espérance de vie ainsi que celles en deuil. Le professeur Kelleher a décrit ce type d'approche comme une communauté compatissante et a identifié un certain nombre de principes et d'actions qui façonnent ces communautés dans une . Il a expliqué que les expériences de fin de vie ne relèvent pas uniquement de la responsabilité du système de santé et qu’il incombe à chacun de prendre soin les uns les autres en période de crise et de perte.

Le Canada a été l'un des premiers pays à adopter ce modèle, et la Colombie-Britannique (C.-B.) a été la première province canadienne à appliquer cette approche à l'échelle provinciale pour engager et éduquer les partenaires communautaires dans une vision commune. En Colombie-Britannique, nous comptons plus de 125 partenaires communautaires qui ont été soutenus par des subventions de démarrage et ont accès à des formations gratuites, des boîtes à outils et à un encadrement soit pour lancer une communauté compatissante, soit pour bâtir une initiative existante correspondant à ces principes.

Pablita Thomas
Pablita Thomas (PT) : Le mouvement des communautés compatissantes a permis d’approfondir les conversations en fin de vie et de prendre en compte à la fois les composantes des soins formels et informels. Cela a aidé non seulement les sociétés de soins palliatifs mais aussi d’autres praticiens à réellement identifier les obstacles et les lacunes du système de santé. C’est ainsi que l’approche de soins des communautés compatissantes a soutenu les personnes en fin de vie, y compris celles en deuil.

DP : Votre séance d'une journée entière comprend des conférenciers qui parleront à de nombreuses communautés compatissantes différentes : canadiennes, internationales, pédiatriques, autochtones, etc. Quels étaient vos objectifs lorsque vous avez conçu cette séance ?

EH : Une communauté compatissante n’est pas seulement un modèle ou un cadre prescrit. Il s'agit d'un concept assorti d'un ensemble de principes clés que toute initiative ou programme communautaire peut adopter. Ce n'est pas une panacée. Tout ce qui émane et est dirigé à la base par une communauté qui adopte ces principes et soutient une vision commune pour résoudre un problème de santé publique, c'est une communauté compatissante. C'est pourquoi Pablita et moi avons décidé d'apporter des idées, des approches et des modèles différents qui ne limiteront pas les participants ni le public à une façon spécifique d'appliquer ce concept.

PT : Le rôle d’une communauté compatissante face au deuil correspond exactement à ce que dit Eman. C’est une démarche d’accompagnement des individus. Le soutien aux personnes en deuil est offert suivant différents concepts et différentes organisations, de manière formelle et informelle. Nous sommes une nation très engagée au Canada et nous avons un taux de réussite enviable dans la majorité de nos services de santé qui sont enracinés dans la communauté. Néanmoins, il y a place à l’amélioration lorsque nous examinons l’intégration dans nos modèles. C’est là que les modèles internationaux peuvent entrer en jeu. Le croisement des modèles peut aider nos communautés et nos systèmes de santé à améliorer l’accessibilité des services. Dans notre séance, nous nous concentrons sur le deuil, car il s’agit d’une partie importante du continuum de soins palliatifs et inévitablement tout le monde a vécu ou connaîtra un deuil à un moment donné.

DP : Au Congrès international des soins palliatifs de ş«ąúÂăÎč, les gens viennent de nombreux pays et cultures. Pensez-vous que votre session intĂ©ressera Ă  leurs diffĂ©rents types de communautĂ©s ?

PT : Absolument ! Je siège au pour les îles anglophones. Ce que nous constatons dans une région de 18 millions d'habitants répartis sur 20 îles, c'est que le chagrin et le deuil sont soutenus au niveau communautaire par des chefs spirituels et des soutiens familiaux informels, mais ils ne sont pas du tout intégrés dans le système des soins de santé. Même s’ils le sont, il demeure des stigmates et des tabous qui se manifestent souvent lorsqu’une personne cherche du soutien dans une clinique ou un service rénuméré. Et je sais qu’on retrouve ce même scénario dans d'autres pays, par exemple le Brésil et certains pays africains. Il est primordial de reconnaitre le soutien communautaire en matière de chagrin et de deuil, mais également de considérer l’intégration de ce besoin de santé publique à notre système de santé, tout en luttant contre les tabous qui existent lorsque les personnes cherchent des services. Il s’agit d’une conversation utile, et je pense que les représentants internationaux s’inspireront de leur propre expérience vécue. Des moments « Aha » sont attendus.

DP : Cela pourrait-il être une opportunité pour les gens d'examiner les services de soutien dans leurs propres institutions et communautés, de s’en inspirer et d'obtenir des conseils sur la façon de démarrer une communauté compatissante ?

EH : Oui ! Une variété d’idées et d’approches seront partagées dans différents panels et présentations. Nous attendons la contribution de personnes venant de tous les horizons, de tous les pays et de toutes les communautés, ainsi que de cultures diverses. Cela promet d’être très riche et inspirant.

Le mouvement Compassionate Community étant mondial, il est tout à fait approprié de le présenter à un public international. En même temps, nous nous concentrons sur l’application et les avantages potentiels de l’utilisation de l’approche communautaire compatissante dans le contexte du deuil, car après la pandémie, on a constaté une augmentation importante des demandes de soutien pour le chagrin et le deuil à l’échelle mondiale. Même dans un pays développé comme le Canada, le système de santé n'offre pas le soutien psychosocial nécessaire. Ces besoins sont principalement offerts par le secteur communautaire à but non lucratif. La séance du 16 octobre est conçue pour nous rappeler que la communauté joue un rôle important dans le soutien de la santé mentale et du bien-être des personnes qui traversent un parcours de deuil. Les conférenciers partageront diverses façons efficaces d’aider la communauté à maintenir ce rôle vital.

DP : Une dernière pensée ?

EH : Il y en a pour tous dans notre session. Même si le deuil demeure une expérience personnelle, se soutenir mutuellement est une responsabilité sociale au niveau individuel ainsi qu'au niveau de la communauté et de la société. De nombreuses idées et expériences seront partagées, auxquelles les gens pourront s'identifier, les rapporter à leur communauté et les adopter.

PT : Je pense également que beaucoup de nos présentateurs portent deux chapeaux : ce sont soit des cliniciens qui font augmenter la cause, soit des cliniciens qui fournissent des services directement à la population, ils savent comment différents concepts de soins fondés sur des données probantes ont soutenu leur travail. Je pense que les participants seront plus à l’aise quant à leurs connaissances du deuil, ainsi que sur la manière dont ils peuvent intégrer les approches du concept des communautés compatissantes dans leurs pratiques.

Nous tenons Ă  remercier le Congrès de ş«ąúÂăÎč de nous avoir demandĂ© de faire une prĂ©sentation sur ce sujet, car il a fallu la COVID pour que nous comprenions vraiment la nĂ©cessitĂ© d’offrir les services d’accompagnement du chagrin et du deuil au niveau communautaire. C'est vraiment agrĂ©able de voir qu'il s'agit d'un forum d'une journĂ©e entière oĂą nous pourront vraiment parler de chagrin et de deuil, sous les angles informel, formel, clinique et non clinique. Nous sommes tous concernĂ©s par cette expĂ©rience. En tant que professionnels de soins de santĂ© et de bĂ©nĂ©voles, la place accordĂ©e au chagrin et au deuil au cĹ“ur du Congrès, nous aide Ă  normaliser ces questions et nous aide en tant que professionnels de la santĂ© et bĂ©nĂ©voles Ă  mieux soutenir nos communautĂ©s.

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Traduction par : Suzanne LeBlanc & Lucie Allaire

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